jeudi 11 novembre 2010

Regard critique des assises de l’interculturalité

rwarmont aime le point de vue de Guy Haarscher sur les assises de l'interculturalité #MatinPremiere


Lire aussi:
Guy Haarscher : un regard critique sur les conclusions des assises.
Entretien par Jean-Claude Matgenparu sur lalibre.be

Le professeur Guy Haarscher (ULB) avait été convié à participer aux travaux du comité de pilotage des assises de l’interculturalité.

Il en a démissionné en chemin pour diverses raisons, ayant notamment trait au fait qu’il a trouvé assez peu "convaincantes" les modalités de rédaction (au cours d’un seul week-end, sans tenir compte de l’avis des absents n’ayant pu se libérer) et de correction (exigée dans un délai d’à peine 48 heures, alors que de sérieuses questions de fond étaient en jeu) du rapport.

Pour autant, en connaisseur qu’il est d’une problématique tout sauf neuve, il a pu jeter un regard critique sur le travail final.

Y a-t-il dans le rapport du comité de pilotage des recommandations auxquelles vous souscrivez ?

Oui. Celles qui portent sur la lutte à mener contre le racisme, qui encouragent l’apprentissage des langues ou un monitoring socio-économique, qui vont dans le sens d’une meilleure intégration sont bonnes à prendre et elles devraient être mises en application par les politiques.

D’autres, au contraire, ne rencontrent pas votre assentiment ?

En effet. Je crois qu’on a commis l’erreur de mettre sur le même plan les propositions de nature à lutter contre le racisme en tant que tel, à savoir le rejet des autres pour ce qu’ils sont, et l’acceptation ou non des revendications d’ordre religieux. Cela me dérange.

Ainsi de la proposition d’autoriser le port du foulard pendant les trois dernières années du secondaire. Les écoles doivent pouvoir mener des politiques d’intégration mais sans que les ouvertures qui ont fait progresser la société et qui sont, précisément, liées à une certaine "discrétion" de la religion, soient remises en question.

L’expression publique de la religion est difficile à gérer, elle s’accompagne souvent de régressions à l’égard des droits des femmes par exemple, de critiques à propos de la liberté sexuelle, de l’homosexualité, etc.

En ce sens, les recommandations qui font la part belle aux revendications religieuses ostentatoires et conservatrices me semblent critiquables.

C’est pour les mêmes raisons que je suis hostile au port du foulard et des signes convictionnels dans les services publics.

Le rapport préconise leur interdiction uniquement si les fonctionnaires sont investis d’une fonction d’autorité.

Cela me semble aller dans la mauvaise direction, parce que, quand on travaille pour l’Etat, on doit, quelle que soit la fonction occupée, pratiquer une neutralité absolue.

Quid d’une extension éventuelle des accommodements raisonnables ?

Il faut sur ce point absolument distinguer la question du handicap de celle des convictions religieuses. Une chose est de permettre à une bibliothécaire infirme de pouvoir travailler dans de bonnes conditions, une autre est de répondre aux revendications identitaires en dérogeant à certaines règles générales.

La confusion entre les deux problèmes est délétère et risque de servir la cause des fondamentalismes ou des conservatismes religieux. Et ça, ça m’inquiète.

Y a-t-il eu chez certains participants aux assises des velléités de verrouillage du débat ?

Il y a eu parfois une sorte de "Sainte-Alliance" entre les représentants des différentes confessions religieuses.

Il est dommage qu’on n’ait pas ouvert le rapport de façon systématique à l’expression d’éventuelles opinions dissidentes même si certaines voix critiques se sont exprimées, dans des sens opposés, en fin de rapport.




Lire aussi:
Matin Première : assises de l'interculturalité

C'est aujourd'hui que se terminent officiellement les assises de l'interculturalité. Pour faire le point sur ces réflexions, Bertrand Henne reçoit Marie-Claire Foblets, professeur de Droit et d'Anthropologie à la K.U.Leuven, co-présidente du comité de pilotage des assises.

Des assises et des résignations

Billet radio pour la Première (RTBF), 9 novembre 2010 - Ecoutez le podcast

Les assises de l’interculturalité ont donc remis leur rapport hier. Comme d’habitude – c’est au moins le 3ème exercice du genre -, il y a du travail de qualité. Mais sa philosophie grève une grande partie des acquis : se baser sur la gestion d’un pluriel résigné, et non sur la confection de valeurs communes. Il est difficile de réduire ce débat, complexe, mêlant aspects sociaux, culturels, économiques, symboliques.

Aucun commentaire: